MODIFICATION DE L’ORGANISATION DE L’ENTREPRISE : QUAND FAUT-IL CONSULTER LE CSE?

By 27 mai 2019Veille

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Modification im- portante de l’or- ganisation d’une direction ou d’un service, projet d’acquisition ou de cession de filiale, modi- fication importante des struc- tures de production… la vie de l’entreprise est une succession d’évènements et de décisions susceptibles d’affecter l’orga- nisation économique ou juri- dique. Dans ce type de cas, le Code du travail commande à l’employeur d’informer et de consulter préalablement le CSE (article L.2312-8 du Code du travail). Lors de la réécri- ture des attributions du CSE, les exemples sur les situations concrètes dans lesquelles l’in- formation-consultation était requise ont été supprimés. Ces
cas demeurent néanmoins tou- jours valables (ancien article L.2323-33).
Dans les projets de réorgani- sation organisationnelle ou juridique d’une entreprise, la détermination du temps de la consultation du CSE est une va- riable qui constitue un des fac- teurs de succès et peut impacter significativement le calendrier prévisionnel et les risques. Disposer des bons paramètres dans un ensemble plus vaste devant intégrer le processus de décision propre à l’entreprise, les actes préparatoires néces- saires à l’analyse de faisabilité puis aux conditions de mise en œuvre et au financement, est primordial.
Quand informer
et consulter ?
« Les décisions de l’employeur sont précédées de la consulta- tion du comité social et écono- mique. » Ce principe de l’exer- cice des prérogatives du CSE devient un casse-tête lorsque les dirigeants le confrontent aux contraintes opérationnelles. Cette « décision » prend des formes parfois difficiles à iden- tifier selon la nature du projet, la culture d’entreprise, sa gou- vernance, son organisation… En pratique, il faut identifier le chemin critique, de la phase d’analyse du projet et des dif- férentes options envisagées qui ne nécessitent a priori pas d’information-consultation préalable jusqu’à l’approbation
par un organe dirigeant ayant autorité pour engager l’entre- prise et décider d’un scénario suffisamment déterminé dans son principe pour avoir une incidence sur l’organisation. Si postérieurement à cette déci- sion, des ajustements restent possibles, le CSE devra être préalablement informé et consulté. Dans un projet com- plexe à décision échelonnée, une information-consultation peut être obligatoire à chaque étape (chambre sociale de la Cour de cassation, 07/02/1996).
Comment prévenir les risques liés à un retard de l’information consultation ? Dans les opérations de fusion, d’acquisition ou de cession de filiale, cette question doit être posée dès le démarrage des travaux. Il s’agit d’un paramètre au même titre que le démarrage des audits, l’obtention d’un fi- nancement ou d’une autorisa- tion réglementaire. Sur le plan de la méthode, si des opérations ponctuelles structurantes sur le plan de l’organisation juri- dique ou économique sont sus- ceptibles de se répéter dans le temps, un accord collectif pourra définir les modalités de la consultation et des diffé- rentes étapes de ce processus lorsque les projets exigent une consultation (article L.2312-55, 2° du Code du travail).
Les risques sont suffisamment perturbants sur le bon déroule- ment d’un projet de ce type pour
les anticiper et devoir anticiper l’impact en termes de délai de mise en œuvre et de coûts in- duits. Le délit d’entrave au fonc- tionnement régulier du CSE du fait d’une absence d’information en temps utile est souvent pré- sent à l’esprit.
Les demandes en suspension du projet formé en référé pour contraindre l’employeur à en- gager la procédure d’informa- tion-consultation peuvent re- tarder de manière importante la mise en œuvre d’un projet. Cette action ne pourra néan- moins être engagée que s’il est démontré que le délai d’infor- mation-consultation applicable au projet concerné court tou- jours au regard de la date à laquelle la décision de l’entre- prise qui aurait dû faire l’objet d’une information-consultation préalable a été prise. À défaut, l’entreprise devra, en plus des incidences pénales éventuelles, réparer civilement cette viola- tion des prérogatives du CSE par le versement de dommages et intérêts.
Certains juges ont pu suspendre l’effet de la décision prise par l’entreprise voire l’annuler. Le Code de commerce prévoit toutefois la nullité des délibé- rations de l’Assemblée géné- rale appelée à délibérer sur des modifications de l’organi- sation économique ou juridique de l’entreprise à défaut d’avis rendu par le comité d’entreprise (article L.225-121 du Code de commerce).

—— chroniques ——

28 – Entreprise & Carrières – n° 1434 du 27 mai au 2 juin 2019

la chronique juridique

Yvan William

Cabinet d’avocats indépendants en droit social, Ancien DRH et directeur de projet en stratégie sociale